Sous la forme d’une lettre personnalisée que l’auteur, le ci-devant Jean-Claude Kimpuny, journaliste au quotidien kinois L’Observateur adresse à l’héroïne, on découvre dans cet essai de 138 pages, Editions Mabiki, www.mabiki.net publié en 2013 que Kimpa Vita, de son vrai nom Nsimba Mvita, est née en 1684.
Et qu’à ses 20 ans d’âge, soit en 1704, elle aurait eu une vision, mieux, l’apparition d’un être spirituel qui, de son avis de chrétienne catholique, serait «Saint Antoine de Padoue». Et qu’à la suite de cette vision purificatrice alors qu’elle était sous une forte fièvre, voire à l’article de la mort, elle se serait brusquement rétablie. Voilà qui va consacrer sa mission prophétique de «prêtresse», de «nganga» sinon de « guérisseuse ».Elle aura le don entre autres de guérir de la stérilité ou des mauvaises récoltes. Elle va prêcher, face à la foule nombreuse qui vient l’écouter, la restauration du royaume, la nécessité d’une libération du joug colonial, de la domination occidentale, de la dictature sous toutes ses formes. Elle s’opposera jusqu’à l’impérialisme et à l’extrémisme de l’Eglise catholique romaine. Et lorsque le royaume Kongo sera morcelé et divisé par ceux qui tenaient d’y pérenniser leur domination pour mieux l’exploiter, elle va prêcher la nécessité d’une réunification.
Son succès fou va lui valoir d’abord l’interdiction d’exercer ses activités sur toute l’étendue du royaume. Ensuite à l’instigation des pères capucins italiens, particulièrement à la réquisition du Père Lorenzo, cette Jeanne d’Arc qui n’a eu qu’un ministère prophétique de deux ans, car à 22 ans, alors qu’elle a à peine un enfant avec son mari Monsieur Barro, la triste sentence des prêtres missionnaires blancs ne va pas tarder à tomber, accusée qu’elle sera d’avoir pris un faux nom-celui de «Saint Antoine»-;d’avoir trompé le peuple par des hérésies et des faussetés; de sorcellerie et d’initiation aux rites «nganga» alors que, selon l’auteur, cela était normal pour elle qui était «nsimba », jumelle…
Pour cela, elle devait être brûlée vive, concomitamment avec son enfant, elle sur un premier bûcher et son bébé, sur le second.
Mais avant la mise à l’échafaud, une mystérieuse dame inconnue venue d’on ne sait où qui s’appelait Maman Mafuta Appollonia viendra lui arracher mystérieusement son enfant des bras avant de disparaître dans les bois, mais non sans avoir prononcé au préalable devant la foule médusée :
« Que Kimpa Vita, brûlée vive et non son esprit ; Que son fils reviendra pour la libération du peuple Kongo du joug colonial, de la traite négrière et de l’impérialisme religieux ».
En d’autres termes, selon l’auteur, son fils revenu sous la forme et l’esprit incarné de Simon Kimbangu devra également prêcher Christ et exiger, comme sa mère Kimpa Vita et selon la prophétesse Mafuta Appollonia, la libération de son peuple, et son sort, identique à celui de sa mère.
L’auteur dans sa narration épistolaire révèle que lorsque l’héroïne Nsimba Mvita ou Kimpa Vita Ndona Béatrice est ligotée et mise sur le bûcher, elle osera narguer jusqu’au bout le Père Lorenzo qu’elle fixera du regard et à qui elle dira : « Brûlez mon corps, mais pas mon esprit que je dédie à Nzambi a Phungu a Lulendo », le Dieu Tout-Puissant en langue kikongo.

Un combat à poursuivre…
Pour l’auteur, le modèle de combat de cette dame audacieuse mérite d’être poursuivi.
1. L’auteur qui salue le combat de cette Maman africaine d’héroïsme et de résistance face à un pouvoir autoritariste rappelle que les nègres exportés et vendus vers les Amériques étaient confinés dans des plantations où ils devaient travailler et se reproduire. Ainsi en Louisiane, une de ces plantations est devenue un célèbre site pénitencier après l’abolition de l’esclavage où il est baptisé « Angola ».Célèbre par les actes de torture et de barbarie aux prisonniers majoritairement noirs.
2. Sous la prétendue mission de défendre le pays découvert par Henri Morton Stanley contre les velléités d’esclavagistes arabes, Léopold II qui fit de ce vaste territoire le «Domaine de la Couronne », entendez son bien privé, y règnera en maître absolu en y commettant les pires des atrocités. Cas de ceux qui voyaient leurs mains coupées lorsqu’ils n’apportaient pas la quantité exigée de caoutchouc, sans oublier les meilleures de nos œuvres d’art systématiquement confisquées et envoyées au Musée Royal de Tervuren. L’ouvrage de Joseph Conrad intitulé «The heart of Darkness»(Au cœur des ténèbres) est ici très révélateur.
Les frontières désormais marquées du sceau de l’intangibilité ont vu des peuples jadis unis, séparés ; leurs langues, us et coutumes, organisations administratives, croyances et savoirs scientifiques complètement déstructurés.
3.Brûlée vive, il n’y eut, depuis, aucune procédure de sa béatification ni de sa canonisation alors qu’elle fut une fervente catholique, ni aucune mesure de réhabilitation par son pays, en dépit du fait qu’elle ait été condamnée pour avoir exigé la réunification de trois royaumes originaux en une seule entité.
Voilà pourquoi l’acte posé par Joseph Kabila en réhabilitant la mémoire de cette héroïne dont le nom désigne l’un des aéronefs de Congo Airways est une grande première et mérite d’être gravée en lettres d’or dans les annales de la RDC.
Reste à initier une procédure de révision d’un procès inique, Kimpa Vita ayant été injustement condamnée pour des motifs politiques.
L’INTERMEDIAIRE (REMAKE Facebook Eugène Ngimbi Mabedo du 9 Juin 2016)
Eugène Ngimbi Mabedo